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À toi, celle qui pensait que j'étais sa connasse
Nous nous sommes rencontrées à la fac. Tu étais assise à deux sièges de moi, tu disais des saloperies sur une personne et pour rire, je t'ai dit : « Mais tu m’as l’air d’être une sacrée langue de pute », cela ne t’a pas fait rire. S’en sont suivies quelques excuses de ma part et nous nous sommes plus quittées pendant huit ans.
Huit ans de mensonges et de jalousie de ta part. Je me rendais compte de rien.
Tu invitais les gens à ton anniversaire, tu préparais ça derrière mon dos, sûrement que ces personnes ne devaient rien me dire : « surtout n’en parlez devant elle ». Le lundi matin, tu revenais avec des photos que tu montrais fièrement à tous ceux qui étaient présents.
« Ben, tu as fêté ton anniversaire ce week-end, pourquoi tu ne m’as pas proposé de venir ? », à cette question, les autres détournaient leurs regards que je savais complices et d’une voix sérieuse comme si j’étais un problème : « Non mais tu comprends, je ne sais pas si ça allait passé avec tout le monde, t’es bizarre ».
J’ai entendu cette phrase tellement de fois, pour l’enterrement de vie de jeune fille de F., aux soirées organisées pour nos fins d’années ou juste aux soirées entre potes.Nos amis, je ne voulais plus les voir puisqu’apparemment pour eux j’étais trop bizarre. Je me suis isolée de tous et il n’y avait que toi mais pas à n’importe quel prix. Je devais te voir quand tu avais le temps, selon ton humeur et quand par chance les autres étaient là, tu me briefais sur le comportement que je devais avoir, ce que je devais dire, tu as été jusqu’à limiter mes portions de nourriture quand nous mangions tous ensemble. Après, tu me faisais un débrief de la soirée, bien sur cela tournait autour de moi et ma bizarrerie légendaire. Tu dégoulinais : « tu vois, je culpabilise de te dire tout ça, mais c’est pour que la prochaine fois, ça se passe mieux. Tu ne m’en veux pas ? »
Non, je ne t’en voulais pas. J’étais trop conne, j’étais ta connasse.
J’écrivais beaucoup. Nos amis tenaient le journal de la fac. Un jour sous l’insistance de certains, j’ai lu mes textes… plus de dix pages, écrites avec ma jeunesse. Ces nouvelles, je voulais les garder pour toute la vie et tu le savais, tu savais que je m’éclatais à écrire. Tu savais que je tenais à mes textes, je les gardais tous.
Mais ceux-là étaient particuliers, je les aimais plus que les autres. Ça aussi tu le savais. Les potes m’ont proposé de les publier en tant que nouvelles, mon surnom à l’époque était « la fourmi », tous étaient contents pour moi. Ce soir là, j’ai dormi chez toi comme souvent, tu m’as bordé avec ton éternel sermon. Je me suis levée ce matin là, speed pour aller à la fac, toi tu n’avais pas cours.
En arrivant, j’ai posé mon sac sur mon pupitre, pris quelques stylos et feuilles. Cool, le prof a du retard, je vais en profiter pour relire fièrement mes nouvelles, puisque « mes amis » vont me publier, en plus ils ont insisté. Je me sens heureuse. En fait, ils m’aiment.
Les textes ne sont pas dans mon sac, pas grave ils sont chez toi, mon amie, ma copine, ma confidente et surtout celle qui est la seule à pouvoir m’apprécier, à être capable de voir qui je suis réellement. Tu me l’as souvent dit : « Non mais moi, tu sais, je te comprends ».
On se voit l’après-midi, je te demande de filer mes écrits aux gars. Tu m’as dit : « pas de problème. »L’édition du mois sort, et pas de nouvelles, rien. Je vais m’expliquer avec les autres et ils me répondent qu’ils n’ont jamais rien reçu ni de ma part ni de la tienne. Je te demande où ils sont et avec ta tête d’ange, ta tête d’amie, de copine, de confidente : «Je ne sais moi, je ne les ai pas tes textes, ça va pas commencer Brioche. Ils sont sûrement chez toi ».
Crédule, je t’ai cru. Tellement crédule, que je ne les ai même pas cherché. En fait non, je ne voulais pas voir la vérité en face. Je savais qu’ils n’étaient pas chez moi, que tu me les avais volé. Je ne voulais juste pas me l’avouer. Je t’ai rendu ton amitié que six ans après cette histoire Au fond de moi, j’espérerais que tu me les rendre un jour. Mais non, rien.
Tu m’as fait rire, ce jour là quand je t’ai vu. Je te la tendais comme ça, cette belle passion. Tu ne voulais pas la récupérer, normale puisqu’elle était pourrie. Je l’ai donc laissé tomber par terre et je suis partie. J’aurai voulu être à ta place pour me voir partir, je devais être super belle, n’est-ce pas ?
En volant mes textes, tu as pensé que cela résoudrait tous tes complexes et tes peurs, t’as cru que manger un bout de moi allait te faire devenir moi. En fait, non tu resteras toi, cette fille jalouse. Cette fille si imparfaite et moi si parfaite à tes yeux, celle que tu as toujours voulu être.
Si seulement tu t’étais regardée comme je t’avais regardé. Aimée comme je t’avais aimé.
Si seulement t’avais juste fait cet effort, aujourd’hui j’aurai encore mes textes et toi tu serais sûrement une femme heureuse.À toi, celle qui pensait que j’étais sa connasse.
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Commentaires
17Mademoiselle-JujuLundi 2 Mars 2015 à 23:04Ton texte m'a émue... J'ai vécu une amitié similaire et ça a énormément impacté ma vie, encore aujourd'hui...
Bravo pour ton texte, c'est magnifiquement écrit.
Quelle expérience vécue. La confiance en soi quand on est jeune c'est difficile surtout avec ce genre de personnes. Ce que la jalousie peut faire faire. En tous les cas, une sacrée expérience et tu en sors grandie, au contraire de cette fille
12nounourseMardi 21 Octobre 2014 à 20:53J'ai lu ton article en entier et je me suis reconnu dans ton récit. Je pense qu'on a toutes eu à un moment ou un autre, pendant un laps de temps plus ou moins long, une "amitié" de ce genre. C'est vrai que ça laisse des traces, mais, ne dit-on pas que ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort ? J’espère que tes amis ont finit par comprendre ce qui se tramait !
Tiens, t'es sure que ce n'est pas toi.... "t'es bizarre".
En fait, je ne me rendais compte de rien. Ce n'était pas une relation conflictuelle, où effectivement tu te poses des questions. De plus, elle bloquait la relation avec les autres, donc je n'avais pas d'avis différents.
Ce n'était le genre de fille qui donnait l'impression d'être jalouse ou autre, elle était vraiment douce, sympa... De toute façon, avec le recul, elle manipulait tout le monde ses parents, ses copains, ses amis8interloquéeVendredi 17 Octobre 2014 à 10:23Tu avais confiance en elle malgré toutes les crasses qu'elle te faisait (ne pas t"inviter à ses fêtes etc) ? Tu es bizarre comme nana de t'être accrochée à une fille comme ça.
Fred : je n'ai pas eu le temps d'y penser sauf là, en écrivant. Je regrette surtout quelques amis que j'avais à la Fac.
4interloquéeJeudi 16 Octobre 2014 à 16:44J'avoue que j'y repense encore.
j'ai arrêté d'écrire pendant dix ans, je n'avais plus aucune inspiration.
Pourtant, elle avait tout pour elle et en plus pourquoi moi ? Je l'ai jamais su.Autant cela a dû être difficile à vivre, autant il a dû être difficile d'ouvrir les yeux ! C'est tout simplement hallucinant !
1zozomumJeudi 16 Octobre 2014 à 09:34
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Géraume... Désolée, j'ai viré ton message. Tu peux en écrire un autre mais sans les insultes sinon je l'effacerai aussi